Et si je vous parlais de l’autisme?

En ma qualité de romancier/essayiste en herbe, je m’intéresse à la psychologie de mon environnement social et culturel. Depuis quelques mois, j’observe les comportements de deux enfants, quasiment de même âge, lorsqu’ils interagissent dans leurs jeux, et expriment leurs besoins et leurs sentiments. Ils sont cousins. Le moins âgé est très communicatif. Il réagit avec davantage de facilités aux émotions des autres. Il baragouine maman et papa, répond aux sourires, et par moment, imite des pas de danse. Alors que celui de deux ans, lui, il peine à échanger avec son environnement. Plutôt que de reproduire ce qu’il entend, il s’exprime par le toucher. Par exemple, lorsqu’il veut transmettre une information à quelqu’un, il se dirige vers lui, le tapote au cas où il s’en apercevrait pas encore, puis lui fait des signes de l’index. Face à un refus ou une interdiction, il met des coups pour exprimer son mécontentement, pleure, et parfois crie très fort.
D’observation, je me faisais l’hypothèse qu’il s’agirait peut-être d’un problème de surdité, et que consulter un spécialiste dans ce cas serait fondamental. Cependant, sa mère m’a appris que elle aussi avait eu des difficultés similaires au cours de son enfance, et qu’elles étaient liées au fétichisme. Jusqu’à l’âge de dix ans, elle comprenait parfaitement quand on lui parlait, mais éprouvait du mal à trouver les mots pour y répondre. Cette situation, regrette t-elle, avait retardé son entrée à l’école. J’ai demandé des nouvelles du garçon récemment, et selon les avis, il semble avoir progressé. Il est capable de comprendre une dizaine de mots, répéter maman, tatie et bonsoir, et joue à Temple Run sur une tablette avec une dextérité surprenante. Néamoins, il reste souvent froid et son côté agressif persiste. Est -ce un problème d’éveil? A coup sûr, mon avis de profane serait l’affirmative. Mais lequel? Seuls des spécialistes détiennent les réponses. Sauf que son attitude et le cas de sa maman me renvoient aux symptômes de l’autisme chez un enfant.

Revenons à notre fil conducteur. L’enfant est agressif. Il est toujours prêt à mettre des coups. En guise de sermon que, sans nul doute, il ne comprendra guère, sa tante et sa mère le frappe quand elles en ont ras le bol. Ce qui signifie, au lieu d’être assisté dans son anomalie, elles l’ont roué de coups. En plus, il est sans cesse comparé à son cousin. Dans un tel conditionnement, comment pourra t-il développer la tolérance, l’empathie et un niveau de sociabilité à l’avenir? Admettons que à l’âge adulte, il côtoie des femmes sans avoir subi d’examens cliniques et de thérapies. Ne risquera t-il pas de reproduire le même schéma dans lequel il a débuté? Qu’est-ce que sera sa vie affective, voire sexuelle?

Par définition, l’autisme est un trouble neuro développement dont les manifestations sont décrites sous l’intitulé de trouble du spectre de l’autisme ( TSA). Considéré comme un handicap à l’épanouissement d’un enfant, il l’affecte dans sa communication, ses interactions sociales et son comportement. A ce jour, il n’existe pas de médicaments pour le soigner, mais des professionnels de la santé s’accordent sur un ensemble d’approches éducatives en vue d’aider les victimes à s’améliorer. Le trouble dure jusqu’à l’âge adulte. Il serait important pour chaque parent d’observer l’évolution de son enfant dans le milieu familial et social.

En Haïti, les statistiques concernant les personnes autistes aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural, ne sont pas disponibles. La prise en charge est également couteuse. Très peu de familles peuvent se payer le luxe d’un accompagnement psychopédagogique. La journée du 02 avril consacrée mondialement à la sensibilisation de l’autisme appelle donc à de multiples réflexions. Quelqu’un peut souffrir d’autisme sans que son entourage en soit conscient. Il peut également être la cible de stigmatisation et de discriminations. Non seulement à cause de son comportement, mais aussi à cause du manque d’information de la population sur le sujet. L’Etat haïtien ne dispose d’aucune cellule d’accompagnement des personnes victimes, encore moins d’une politique d’éducation inclusive et spécialisée. Par conséquent, un changement de mentalités est indispensable tant au niveau individuel, social que institutionnel.

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