De Tout Et De Rien : De la radio haïtienne aux États-Unis, Guy Wewe raconte son parcours

Le journaliste culturel haïtien et fondateur du Guy Wewe Network, Guy Webern Guerrier, connu sous le pseudonyme Guy Wewe, poursuit son évolution dans le secteur médiatique haïtien malgré les difficultés. Invité du podcast « De tout et De Rien » ce mercredi 17 décembre, il est revenu sur son parcours, sa vision de l’industrie médiatique et le projet de développement de son média, qu’il dit mûrir depuis plusieurs années.

Âgé de 38 ans, Guy Wewe explique nourrir très tôt l’ambition de faire carrière dans les médias. Son enfance se partage entre Bassin Bleu, Port-de-Paix et Port-au-Prince, où il poursuit sa scolarité. Il évoque également l’influence de sa mère dans sa découverte du compas, un genre musical qu’il dit écouter régulièrement durant les années 1990.

Ses premiers pas dans le monde de la radio se font sous la direction de son cousin germain, alors responsable de média. Il débute comme metteur en ondes avant de devenir animateur. Après l’obtention de son bac II, Guy Webern Guerrier tente d’intégrer la Faculté des sciences humaines et sociales (FASCH) en sciences de la communication sociale, sans succès lors du premier examen d’entrée.

Il choisit alors de s’inscrire à l’Institut supérieur d’animation et de communication (ISNAC), où il acquiert les bases du journalisme. Cette formation lui permet de représenter son institution à la radio RCH 2000 sous la supervision de son professeur Richard Devil. Par la suite, après la diffusion d’une émission qui répond aux attentes de la direction de la programmation, Junior Metellus lui propose un poste au sein de la station.

Guy Webern Guerrier

« Dès que je suis rentré dans la radio en 2008, mon collègue Jean-Mary Simon et moi nous sommes allés dans la discothèque de la radio afin de choisir deux jeunes jazz compas, Gabel et Tempo, pour les mettre au-devant de la scène », explique-t-il, en évoquant sa contribution à la diffusion de ce courant musical.

Dans un environnement qu’il décrit comme compétitif, Guy Wewe poursuit son parcours avec constance. De RCH 2000 à Planet Kreyol, puis Vision 2000 et enfin Visa FM, il traverse différentes stations tout en faisant face à divers obstacles.

« Pour moi, ma carrière professionnelle commence à partir de Vision 2000 le 18 juin 2011, parce que quand j’étais dans les colonnes de RCH 2000 ou Planet Kreyol j’étais toujours étudiant, je fréquentais la Faculté simultanément et mon étude était ma priorité », précise-t-il. « Quand j’arrivais là, j’avais pris beaucoup de décision car je savais avec Vision 2000 ma vie va partir de bon train. »

À Vision 2000, il succède à Louko Désir avec l’objectif d’apporter un nouveau souffle à l’émission. Une étape marquée, selon lui, par des expériences déterminantes, notamment lors du Carnaval national de 2013 au Cap-Haïtien, où il agit comme envoyé spécial.

Séphora Drouillard

« Je me disais toujours qu’est-ce que je peux faire qu’il n’avait pas réalisé afin de m’imposer […]. Et en 2013, j’étais l’envoyé spécial du media au Cap-Haitien à l’occasion du Carnaval national. J’ai contacté Kerby Léveillé pour assurer la retransmission avec moi… C’est à ce moment que je découvrais le monde du broadcasting audio. »

De retour à Port-au-Prince, il décide de se former davantage à la retransmission en direct. Il évoque le soutien matériel reçu de Kerby Léveillé, notamment un équipement de base qui lui permet de progresser dans cette spécialité.

Par la suite, Guy Wewe multiplie les déplacements en Haïti et à l’étranger pour couvrir des événements liés à la musique haïtienne. « La première interview que j’ai réalisé à l’extérieur du pays c’était en République Dominicaine en 2013 avec le groupe Boukman Eksperyans… », raconte-t-il, citant également des passages en Martinique, à Paris et à Montréal.

Un incident survenu lors d’un festival à Orlando en 2015 marque un tournant. Un retard de diffusion, lié à un problème de serveur, provoque des réactions dans le milieu. « Carel s’est fâché contre moi en me disant de créer mon propre serveur », relate-t-il.

Carel Pedre

À la suite de cet épisode, il lance concrètement Guy Wewe Radio après avoir investi dans la création de son propre serveur. Il rappelle qu’à ses débuts, ses émissions étaient diffusées sur SoundCloud avant qu’il n’adapte sa stratégie avec l’évolution technologique en Haïti.

En avril 2016, il quitte Vision 2000, évoquant notamment un manque de temps d’antenne. Cette pause lui permet de réfléchir à son positionnement dans un média généraliste, alors que la musique reste au centre de ses priorités. « J’en déduisait que comme la musique c’est ma priorité ce n’est celle du media, je vais chercher une station de radio qui priorise la musique », affirme-t-il.

Cette réflexion le conduit à Visa FM, qu’il rejoint au mois de juin. Il y obtient une plage horaire quotidienne en soirée, un choix qu’il justifie par la fidélité de son audience et le maintien de son réseau de correspondants à travers le pays.

Parallèlement à son activité radiophonique, Guy Wewe développe ses propres infrastructures et crée un studio à Pétion-Ville. Il aborde également des sujets d’actualité, y compris socio-politiques. En 2018, il participe à un mouvement populaire contre la corruption et la dilapidation des fonds publics.

De gauche à droite : Carel Pedre, Guy Webern Guerrier, Séphora Drouillard et Tony Mix

« Quand j’ai pris la décision d’aller manifester j’étais tellement fougueux même ma femme ne pouvait m’en empêcher… », se souvient-il, en évoquant la retransmission en direct de ces événements.

À la suite d’une interview avec l’ancien président Joseph Michel Martelly, il dit avoir reçu des menaces. « Après cette interview, j’ai reçu beaucoup menace… Ensuite d’autre trouble socio-politique m’ont obligé à quitter le pays pour m’installer définitivement aux États-Unis », déclare-t-il.

Installé aux États-Unis depuis 2019, Guy Wewe y a monté un nouveau studio afin de poursuivre ses activités médiatiques. Il évoque des périodes difficiles mais affirme maintenir ses projets. Aujourd’hui, il dit envisager l’élargissement de sa plateforme, avec l’objectif d’offrir un espace aux jeunes, en Haïti comme aux États-Unis, dans des domaines tels que le sport, la politique et d’autres secteurs.

Par Youbens Cupidon © Chokarella

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