Le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a officiellement inscrit, lors de sa session du mardi 10 décembre 2025, le « Compas d’Haïti » (Kompa) sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Cette décision intervient alors que le genre musical célèbre son 70ᵉ anniversaire, une coïncidence relevée au cours de la session.
Une décision unanime
L’organe d’évaluation avait recommandé l’inscription sans réserve. Le Compas y est décrit comme un genre de musique et de danse populaire porteur d’une importance culturelle majeure pour celles et ceux qui le pratiquent. Structuré autour d’un rythme syncopé, le genre mobilise des instruments tels que la guitare, les claviers et les percussions, tout en intégrant des influences issues de traditions africaines, européennes et autochtones.
Le dossier d’évaluation souligne que le Compas traite de thèmes universels tels que l’amour, la liberté, la paix et la résistance. Il met également en avant son rôle en matière de cohésion sociale, de renforcement des liens communautaires et de promotion de l’égalité des genres. La présidente de séance a annoncé l’adoption de l’inscription sans aucune objection, une déclaration accueillie par les applaudissements des délégués présents.
« Le souffle d’un peuple »
Après l’adoption, la délégation haïtienne est intervenue au nom de l’ambassadrice Lila Desquiron. Dans un discours présenté comme un hommage aux dimensions culturelles du Compas, la délégation a qualifié cette musique de « souffle d’un peuple » et de « langue du cœur », insistant sur la manière dont elle relie symboliquement « les tambours d’Afrique et les vents des Caraïbes ».
« Il porte les rires et les luttes, les amours et les espoirs d’Haïti », a déclaré la représentante, rappelant que, malgré les difficultés traversées par le pays, les Haïtiens ont su préserver une relation intime avec la danse et la création musicale. La délégation a également dédié cette inscription à la mémoire de Dadou Pasquet, présenté comme une figure légendaire du Compas, qualifié de « mapou » et récemment disparu.
70 ans d’évolution musicale
Une présentation vidéo projetée pendant la séance a retracé en détail les principales étapes des sept décennies d’évolution du genre :
- Les origines : Au milieu des années 1950, le Compas s’est affirmé comme un mouvement musical dont les instruments accompagnaient des mouvements circulaires rappelant ceux des danseurs.
- L’ère du Mini Jazz : Les années 1970 ont vu l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes qui ont participé au développement du mouvement « Mini Jazz ».
- La mondialisation : Dans les années 1980, la migration haïtienne vers les États-Unis, particulièrement à New York, a contribué à la diffusion internationale du Compas. Des groupes comme Tabou Combo ont consolidé sa présence dans les milieux urbains et dans les communautés diasporiques.
- L’ère moderne : La présentation a mis en lumière la « Nouvelle Génération » apparue dans les années 1990 et a relevé qu’en 2025, les femmes ainsi que de nouveaux artistes, dont Michaël Brun, occupent une place notable dans l’évolution du son.
Une double célébration dans un contexte national particulier
La délégation haïtienne a relevé que cette reconnaissance intervient dans un contexte national marqué par une dynamique particulière. En parallèle de l’inscription du Compas, Haïti célèbre en effet sa qualification pour la Coupe du monde 2026, un événement perçu comme un autre moment de visibilité pour le pays sur la scène internationale.
L’inscription du Compas est présentée par la délégation comme une mise en valeur de la créativité du peuple haïtien. Elle est décrite comme une reconnaissance internationale qui consacre cette musique en tant qu’élément du patrimoine culturel immatériel partagé, accessible à l’ensemble de l’humanité.
