De Tout Et De Rien : Lycinaïs Jean raconte son chemin musical et son ouverture à la scène haïtienne

Invitée du podcast De Tout Et De RIen le mercredi 3 décembre 2025, en pleine tournée aux États-Unis et dans la Caraïbe, la chanteuse franco-antillaise Lycinaïs Jean a retracé son parcours et expliqué sa relation avec la scène haïtienne. Cette tournée comprend une douzaine de dates dans plusieurs grandes villes, dont Los Angeles et New York, « où je jouerai pour la première fois », précise-t-elle. Une seconde partie est prévue en Haïti, avec des arrêts à Jacmel, Jérémie, aux Cayes et à Pétion-Ville, entre autres.

Née en France et « originaire de la Martinique et de la Guadeloupe », Lycinaïs Jean décrit un parcours marqué très tôt par la musique. « Ma première expérience dans la musique c’est d’avoir joué la batterie à 8 ans et toute petite je suivais mon père au studio », raconte-t-elle. Cette proximité familiale lui donne un rapport naturel à la création : « La musique est une affaire de famille pour moi, je ne me suis jamais demandé si j’allais en faire, j’ai toujours eu envie d’en faire tout naturellement. »

À 18 ans, elle choisit de partir en Guadeloupe. « J’ai eu le besoin de me connecter à mes racines, de m’y imprégner », dit-elle. Elle y fait ses premiers pas artistiques avant de retourner en France pour structurer sa carrière.

Au fil de la conversation, l’échange aborde les variations du créole dans la Caraïbe. « Le créole martiniquais et le guadeloupéen se ressemblent, mais il y a des différences, et même avec le créole haïtien on peut se comprendre », note-t-elle. Pour s’adresser plus facilement à différents publics, elle explique avoir dû s’adapter : « J’ai dû apprendre le créole. » Cette attention aux langues nourrit son travail, notamment dans des morceaux interprétés en créole haïtien.

Une relation ancienne au compas

Lycinaïs Jean explique entretenir depuis longtemps un intérêt pour la scène musicale haïtienne. « La scène haïtienne m’a toujours intéressée », affirme-t-elle. Beatmakeuse, elle souligne : « D’abord, je fais mes instru toute seule, je suis beatmaker. » L’envie d’explorer le compas est présente depuis des années, même si elle a d’abord évolué dans le zouk : « J’ai toujours voulu en faire, mais je n’ai jamais pu. J’ai écouté beaucoup de musique compas pour essayer de comprendre les codes. »

Son premier titre en compas remonte à 2020, en collaboration avec Bbo Beat. Avant cela, elle était principalement active dans le zouk. Elle distingue clairement les deux genres : « Dans le konpa, ban dèyè est différent : la façon dont on joue la batterie, la cloche, la tombasse, la guitare et le solo. »

Son premier succès en Haïti date d’il y a une dizaine d’années : « Mon premier succès en Haïti remonte à 2015. » Son titre le plus récent, « Danje », sorti en 2024 et interprété en créole haïtien, marque une étape importante. Le remix réalisé avec Rutshelle Guillaume consolide cette dynamique : « J’ai pris énormément pris de plaisir à faire ce single », indique-t-elle. Parmi les artistes qui ont influencé son écoute, elle cite Ray Raymond, Medjy et Carimi.

Une démarche assumée dans ses clips

Lycinaïs Jean revendique une démarche artistique où sa personnalité occupe une place centrale. Elle revient sur le fait d’assumer son homosexualité dans ses clips : « Je fais ça depuis 2015. Dans tous mes clips, ce sont des femmes, je n’avais pas peur. » Elle insiste sur la dimension d’authenticité : « Je n’ai aucun problème avec qui je suis, ça ne va jamais changer. Je voulais me montrer telle que je suis sans pour autant le cacher. »

Elle reconnaît toutefois que « l’homophobie est encore présente », tout en estimant que la visibilité d’artistes qui assument leur identité contribue à faire évoluer les mentalités. Durant sa tournée, assure-t-elle, elle n’a jamais été confrontée à un accueil hostile : « À aucun moment on me manque de respect. »

Elle évoque également ses habitudes scéniques : « Je préfère jouer en live, mais d’habitude, avec les contrats, je chante avec les DJs. » La guitare demeure néanmoins un élément important de son expression musicale : « J’aime chanter avec ma guitare. »

Par Ann-Olguetty Loodjenny Dieuve © Chokarella

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.