Charles Kesner Jean-Yves publie dix poèmes pour marquer son entrée dans la poésie

L’auteur Charles Kesner Jean-Yves, membre fondateur du groupe de rap kreyòl 45 Soldiers à Jacmel, explique que c’est au sein de cette formation qu’il a commencé à prendre conscience de son potentiel pour l’écriture. Passionné de poésie et de langue créole, il a publié dix poèmes extraits de son recueil « Ou Se Nanm Tèt Mwen » à l’occasion de la Journée internationale de la langue et de la culture créole, le 28 octobre 2025, marquant ainsi son entrée dans le paysage littéraire haïtien.

Derrière la parution numérique de ces dix premiers poèmes se dessine l’itinéraire d’un jeune auteur qui construit son œuvre à partir de son héritage créole, d’influences poétiques et d’une discipline personnelle. À travers cette première publication partielle, Charles Kesner Jean-Yves revendique une naissance littéraire préparée de longue date.

Lors de l’entretien, il revient sur son cadre familial, qu’il décrit comme « beaucoup d’amour, de camaraderie et de rigueur » : « Je suis Charles Kesner Jean-Yves, fils de Charles Medèze et de la dame née Jean-Baptiste Marie Jocelyne. Je suis né le 19 mai 1990 à l’hôpital Saint-Michel de Jacmel ». Benjamin et unique garçon d’une fratrie de trois enfants, il grandit à la rue Pétion #22 dans une Jacmel paisible, un environnement propice à la créativité et à l’observation. Sur le plan éducatif, il suit un parcours continu : « Mon parcours scolaire débute au Centre Alcibiade Pommayrac (CAP) de Jacmel pour finir au Collège Saint-Paul (CSP) en 2009. La même année, j’ai intégré la Fasch pour des études en sociologie », raconte-t-il.

Aujourd’hui, Charles se considère comme « débutant une carrière pour l’instant comme poète ». Plusieurs éléments ont façonné ce choix : il se décrit comme un enfant de la génération 90, celle des « jeux de correspondance, des lettres d’amour, des acrostiches », pratiques qui ont nourri son intérêt pour les mots. La rue Pétion, quartier surpeuplé et actif sur le plan artistique, a également contribué à son développement : musique, peinture, danse, mascarades – Makaya, Kouvrefe, Fresh-up band, 45 Soldiers, Step by Stepdance – autant d’expériences qui ont marqué son adolescence. À l’école, il découvre les œuvres de Félix Morisseau-Leroy, Georges Castera et Franketienne, renforçant durablement son rapport à la langue créole et à la poésie.

Sa prise de conscience passe aussi par la musique. En tant que membre fondateur du groupe 45 Soldiers, il explique : « C’est là que j’ai commencé à prendre un peu conscience d’un certain potentiel pour l’écriture en travaillant en studio avec les autres qui sont pour la plupart des amis d’enfance ». Les textes accumulés sur son téléphone et les publications régulières sur WhatsApp constituent autant de prémices de ce qu’il deviendra comme auteur. Sous l’influence d’ErlJean Pierre (Ti èl), poète et écrivain, il franchit le pas : « Sous son influence, qui me conseille toujours de publier, j’ai pris la décision de publier une partie du recueil de Ou Se Nanm Tèt Mwen à l’occasion de la Journée internationale de la langue et la culture créole ».

Pour Charles Kesner Jean-Yves, le 28 octobre 2025 constitue un acte fondateur : « Officiellement, le recueil de poésie Ou Se Nanm Tèt Mwen, c’est pour bientôt. J’ai publié dix poèmes pour l’occasion et pour avoir mon acte de naissance en tant que poète, histoire de prendre le pouls du terrain ». Il insiste sur l’accessibilité : « Les textes sont en format numérique et totalement gratuits ». Ces dix poèmes annoncent le ton du recueil complet : « l’amour, le sexe, l’aventure, la beauté, la nature. J’ai publié dix poèmes qui représentent presque la moitié du recueil ». L’ouvrage propose « une rencontre avec une muse avec des caractéristiques humaines », précise-t-il.

Sur le contexte du pays, il reste clair : « Dans le cadre de cette publication, la conjoncture du pays n’est pas prise en compte ». Les difficultés sont d’abord personnelles : « Le principal obstacle est le doute. Ce n’est qu’une première pour ma très jeune carrière ». Son regard sur la littérature haïtienne contemporaine reste pragmatique : « La littérature doit épouser le contexte et s’adapter. Bien que la lecture passe de plus en plus au second plan aujourd’hui, il suffit de promouvoir la lecture chez les plus jeunes ». Sur ses projets à court et moyen terme, il évoque plusieurs pistes concrètes : « J’ai plusieurs autres recueils en préparation, je compte participer à des concours de poésie. J’ai un projet d’ouvrage collectif avec d’autres collègues ». Enfin, à la nouvelle génération, il délivre un conseil ferme : « Lire, lire, lire. C’est le secret ».

Par Ann-Olguetty Loodjenny Dieuve © Chokarella

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