BMIXX, douze ans derrière les platines entre passion et persévérance

Le disc-jockey haïtien Laure Bernado Geraldo, connu sous le nom de scène BMIXX, retrace plus d’une décennie de carrière marquée par la persévérance et l’adaptation. Figure familière des platines depuis plus de dix ans, il s’est imposé dans le milieu grâce à son style « open format », capable de mêler plusieurs genres musicaux tout en maintenant une énergie constante.

Né le 30 juin 1990 à Port-au-Prince, BMIXX a effectué ses études primaires et secondaires au collège Jean Marie Guilloux (FIC), puis au Collège Canado Haïtien et enfin au Nouveau Collège Bird, où il a terminé son cycle classique. « Par la suite, j’ai passé deux ans à l’IHECE dans les sciences administratives, mais j’ai abandonné pour prendre ma carrière de disc-jockey plus au sérieux », confie-t-il.

C’est dans les studios de Radio Caraïbes qu’il fait ses premiers pas, sous la supervision de son cousin Valery Lerebours, alias DJ Valmix. « Il voulait m’apprendre comment devenir un bon DJ, vu que je connaissais beaucoup de chansons car j’étais passionné », raconte-t-il.

Dès son adolescence, il développe un intérêt particulier pour la musique. Avec ses camarades, il s’amusait à tester leurs connaissances musicales. « Que ce soit RnB, compas, reggae, dancehall, techno, house music, reggaeton ou riddim… Et j’habitais en face de la radio Caraïbes, rue Chavannes, qui était le quartier général de la musique et de la festivité. Il y avait tout pour être passionné », se souvient-il.

Une passion nourrie par la radio

Fréquentant régulièrement les journalistes de Radio Caraïbes, BMIXX apprend les bases du métier. « Bregard Anderson, un journaliste senior, m’a appris la production, la présentation et l’animation musicale dès mon plus jeune âge. Je m’entraînais jour et nuit avec Valmix », précise-t-il.

Cette rigueur attire l’attention du PDG de la radio, Patrick Moussignac, et de son frère Maxime, qui leur confient des responsabilités sur plusieurs stations, notamment Radio Caraïbes, Sky FM et Énergie FM. « Dès le premier voyage de Valmix vers les États-Unis en 2013, il m’a confié la responsabilité de Sky FM, et c’est à partir de ce moment que j’ai lancé ma carrière officiellement en tant que DJ BMIXX », raconte-t-il.

S’il se lance avec confiance, il avoue que ses études occupaient encore une place importante. « Je jouais afin d’apaiser les charges financières de mes parents, pour que je puisse m’offrir des trucs, me faire plaisir, tout ça », explique-t-il. Il finit par décider de poursuivre plus sérieusement sa carrière en appliquant la devise du Collège Canado Haïtien : « Travail + Discipline = Succès. »

L’art de l’improvisation et la polyvalence

Grâce à son style open format, BMIXX s’adapte à tous types d’événements : bals, festivals ou carnavals. « J’improvise au maximum lors de mes performances, sauf quand je suis à l’étranger : en France, Guadeloupe, Martinique, aux Bahamas ou en République dominicaine. Parfois, je prépare un set pour intégrer des éléments liés à la culture du pays où je me trouve », explique-t-il.

Compétiteur dans l’âme, il affirme : « Il y a un dicton que j’aime beaucoup : un vieillard n’est pas un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces. Dès qu’il y a d’autres DJs sur scène, c’est la guerre, ce n’est plus une question d’émotion. »

Après plus de dix ans d’expérience, il dit avoir appris à mieux gérer les contraintes du métier. « Maintenant, c’est dans le sang. Si je ne performe pas pendant un week-end, je sors quand même pour aller m’amuser avec mes amis », confie-t-il.

BMIXX

Son parcours n’a pas été exempt de difficultés. « Les déplacements sont devenus plus difficiles et risqués. Les ambassades ne fonctionnent plus, je ne peux pas satisfaire les clients qui sont à l’extérieur du pays », déplore-t-il. Malgré tout, il refuse d’abandonner : « Je ne peux pas effacer douze ans d’effort comme ça. Il y a trop de gens qui m’aiment et qui sont accrochés à moi. »

Il en profite pour rappeler aux jeunes que « le talent ne suffit pas, votre personnalité compte beaucoup. C’est l’un des facteurs qui me maintient au niveau où je suis jusqu’à présent. »

Souhaitant transmettre son savoir, BMIXX cofonde l’équipe Deran, une structure qui regroupe plusieurs jeunes DJs, dont Valdy, Vibe, Freemix et HBmix. « En leur partageant mon expertise, ils me renvoient leur touche et la tendance de leur génération. Cela augmente mon audience et me permet de performer pour deux générations. C’est vraiment cool », dit-il.

Soucieux de préserver sa liberté professionnelle, il a refusé d’émigrer vers les États-Unis via le programme Humanitarian Parole lancé par le président Joe Biden. « Je ne voulais pas être bloqué là-bas, bien qu’une bonne partie de notre secteur musical s’installe entre les États-Unis et le Canada », affirme-t-il.

Entre reconnaissance et engagement culturel

« Dans notre business, il y a des choses, dès qu’on ne les a pas, on vous traite en parent pauvre », observe BMIXX, évoquant un manque de reconnaissance dans le milieu. Il souligne toutefois la confiance que lui témoignent les promoteurs et sponsors locaux. « Cela met beaucoup plus de valeur sur mon travail », dit-il.

Toujours actif, il organise chaque année plusieurs événements culturels au Cap-Haïtien et à Port-au-Prince, en collaboration avec Ayiti Gen Bon Gou et Big Bang Fest. « La musique représente tout pour moi », précise-t-il.

Une vision pour l’avenir

BMIXX se réjouit de la présence croissante des artistes haïtiens sur la scène internationale. « Nous avons des artistes qui remplissent des salles en France, au Canada, aux États-Unis. C’est une belle chose pour notre culture », estime-t-il.

Pour lui, la nouvelle génération apporte un souffle nécessaire. « Chacune des générations ajoute quelque chose à nos courants musicaux. Ceux qui mélangent le compas à d’autres sonorités contemporaines comme l’afro invitent d’autres nations à écouter notre musique », remarque-t-il.

Lorsqu’il ne travaille pas, BMIXX profite du temps libre pour écouter d’autres DJs, échanger des playlists à l’étranger, regarder des films ou jouer à des jeux vidéo et de société.

En conclusion, il annonce plusieurs projets à venir. « Je vais faire des mix visuels, dans différentes tendances, et une nouvelle chanson est en préparation avec Afriken. Elle sera bientôt disponible », conclut-il.

Par Youbens Cupidon © Chokarella

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