La chanteuse haïtienne Naysan Tchika, originaire de Saint-Michel, a dévoilé ce lundi 13 octobre 2025 son premier EP intitulé “Premye Gout Dlo“. Composé de sept titres — Simityè, Saw te konprann (ft. Watson G), Gadem, Sa pa pi mal, Brize, Tijès yo (ft. Smat-G) et Premye Gout Dlo (ft. Tafa Mi-Soleil) —, ce projet marque une étape importante dans le parcours d’une artiste qui explore les liens entre introspection, spiritualité et affirmation de soi.
Née Naysan Tchika Pierre, elle se présente désormais sous un nom de scène qu’elle revendique pleinement. « Je suis fière de porter la voix d’une nouvelle génération d’artistes qui veulent bousculer les codes tout en respectant la richesse de nos racines », confie-t-elle. Depuis son enfance, la musique l’accompagne comme une passion façonnée par l’écoute, l’imitation et le travail.
Parmi ses inspirations, Rutshelle Guillaume occupe une place particulière : « Elle m’a donné l’envie de devenir une meilleure chanteuse et d’atteindre une certaine hauteur dans l’expression vocale. » Entre autodiscipline et passion, Naysan Tchika avance avec la conviction que la musique n’est pas seulement un art vocal, mais aussi une voie de témoignage et d’apaisement.
Elle précise : « J’écoute beaucoup de musiques haïtiennes, des rythmes du monde, des voix puissantes, des mélanges stylistiques. Je suis sensible aux mélodies fortes, aux textes qui portent sens, aux arrangements organiques. Je veux que ma musique soit autant ressentie qu’écoutée. » Son écriture s’ancre dans le vécu : « La vie commune, les moments de tendresse et de souffrance, les doutes, les attentes, les séparations : tout cela alimente l’écriture. Quand on traverse des épreuves, ça laisse une empreinte, et je veux transmettre ces émotions sans fard, sincèrement. »
Pensé comme une première immersion dans son univers, Premye Gout Dlo représente, selon elle, « une étape charnière ». Le projet symbolise la découverte et le commencement, le moment où « tout prend sens ». Naysan Tchika y aborde l’amour, la foi, la douleur, la quête identitaire et le dépassement. Chaque chanson, dit-elle, « doit pouvoir résonner dans le cœur de quelqu’un, être un miroir ou un refuge ».
Pour la réalisation, elle a travaillé avec PM On The Beat et Kyky Ou La, qu’elle décrit comme « à l’écoute, respectueux et complémentaires dans la tonalité ». Cette collaboration a donné naissance à un EP ancré dans la culture haïtienne, tout en s’ouvrant aux sonorités actuelles.
« La date de sortie est le 13 octobre 2025, après avoir peaufiné chaque détail pour que le rendu soit à la hauteur de mes attentes. Les titres explorent l’amour, la quête identitaire, la résilience et les émotions qui traversent l’âme quand on grandit dans un contexte intense. Le titre Premye Gout Dlo symbolise ce moment de découverte : c’est la toute première gorgée, la première expérience profonde, le sentiment initial avant que tout ne se dévoile. »
L’EP affirme ainsi sa voix et marque la transition « de l’artiste émergente vers une artiste qui se présente avec une vision claire et une voix affirmée ».
Premye Gout Dlo se compose de sept titres qui dessinent un itinéraire spirituel et émotionnel.
Simityè ouvre le projet dans une atmosphère mystique : « Pa sifle lè map pase bò simityè a, je’m fixe sou zetwal yo menm lè lavi anmè kou fyèl la. » Ce premier morceau évoque la mémoire et la continuité : « Simityè se pa bout chimen, se barikad lavi tounen yon potay lespwa… »
Saw te konprann (ft. Watson G) adopte un ton plus frontal et questionne le jugement des autres : « Si se sè lezòm ki t Bondye, kounya m pat konn kote m tap ye… » Le duo livre un dialogue sincère sur la foi et l’affirmation de soi.
Gadem célèbre la fierté féminine et l’identité créole : « Soti nan tèt rive nan pye, ou ka wèm se yon fanm kreyòl ki ra. » Derrière son rythme entraînant, le titre traduit un message d’indépendance et de liberté.
Premye Gout Dlo (ft. Tafa Mi-Soleil) renvoie à la tradition et à la gratitude envers les ancêtres : « M pral nan bitasyon manman mwen poum ka jete dlo… » Cette collaboration évoque la foi et la reliance aux forces spirituelles : « Èzili kanpe pou mwen non, Badagri kanpe pou mwen non… »
Sa pa pi mal aborde l’enfance et la résilience : « Vin twouve manman m kap monton mòn pa do, m pat wè papam nan grandi m pou pouse dom. » Le refrain, lumineux, transforme la douleur en espoir : « Kounya men mwen, tout bagay chanje, sa pa pi mal. »
Tijes yo (ft. Smat-G) met la gratitude au centre : « Chak grenn jès yo vo lò, tonbe di mèsi pa sifi banm diw… » Une prière rythmée et solaire, empreinte de reconnaissance.
Enfin, Brize évoque la séparation amoureuse : « Pou sa nou pase ansanm, jan w t montre m ou konprann, move van vini nou pranl a de… » Le morceau témoigne d’une maturité émotionnelle et d’une volonté de se reconstruire : « Ou pito kèm brize tan pou ret kwèm, ou kit on lòt pran plas ou telman fè… »
Pour Naysan Tchika, la musique est un lien entre les âmes : « Je veux que mes chansons soient des témoins de ce que j’ai vécu, de ce que je ressens. » Elle estime que « chaque mot posé avec sincérité est un acte engagé ». L’artiste espère inspirer les jeunes filles à « croire en leur voix et se donner le droit d’exister ».
De nouveaux projets sont déjà en préparation : collaborations, clips et peut-être une tournée régionale. « Je veux sortir de ma zone de confort », annonce-t-elle. À moyen terme, elle souhaite bâtir une discographie solide et « faire le pont entre Haïti et le monde ».
Par Ann-Olguetty Loodjenny Dieuve © Chokarella
