Une artiste générée par intelligence artificielle vient de signer un contrat de plusieurs millions de dollars et de faire son entrée dans les classements du Billboard. Son nom : Xania Monet.
Xania Monet n’a rien d’une chanteuse en ascension classique. Elle ne montre jamais son visage, n’active pas sa caméra lors des réunions et refuse de chanter sur demande. La raison est simple : Xania n’existe pas physiquement. Elle est le fruit du travail de Telisha “Nikki” Jones, une designer et poète installée dans le Mississippi. Grâce à la plateforme de création musicale Suno, Jones a transformé ses poèmes en chansons complètes.
L’initiative a attiré l’attention du milieu. Une compétition entre maisons de disques a porté les offres jusqu’à trois millions de dollars, avant que Hallwood Media, dirigée par l’ancien cadre d’Interscope Neil Jacobson, ne conclue un accord à plusieurs millions. Selon son manager, Romel Murphy, environ 90 % des textes utilisés pour Xania proviennent de l’expérience personnelle de Jones, le reste s’inspirant de son entourage.
La créatrice, âgée de 31 ans, dit avoir grandi en chantant à l’église, tout en reconnaissant qu’elle n’aurait pas pu décrocher seule un contrat d’enregistrement. Avec l’appui de l’IA, ses textes prennent la forme de morceaux interprétés par des voix générées, parfois enrichies d’éléments réels. Résultat : plusieurs titres sont parvenus à entrer dans les classements. La semaine dernière, Xania a atteint la 25ᵉ place de la liste Emerging Artists, la 21ᵉ place du Hot Gospel Songs, et la première position des ventes numériques R&B avec How Was I Supposed to Know.
Au total, son catalogue cumule 9,8 millions d’écoutes aux États-Unis, dont plus de la moitié sur la seule dernière semaine, selon les données de Luminate. Mais cette visibilité ne s’accompagne pas seulement de succès. Suno, la plateforme derrière ce projet, fait l’objet de poursuites judiciaires intentées par de grands labels pour violation de droits d’auteur. Ce contexte explique pourquoi certains acteurs du secteur se sont tenus à l’écart des enchères.
Pour Neil Jacobson, l’investissement reste un pari sur l’avenir. Hallwood Media a déjà signé un autre artiste virtuel, imoliver, également né de Suno, dont le titre Stone a accumulé plusieurs millions d’écoutes. La question qui demeure est celle de la durabilité de ces carrières et de la transposition de telles créations sur scène.
Depuis des décennies, l’industrie musicale s’appuie sur la recherche de talents et la mise en avant de l’authenticité. L’émergence d’artistes conçus par intelligence artificielle bouscule cette logique. En moins d’un an, une poète sans expérience dans la musique a créé une artiste virtuelle qui figure aujourd’hui parmi les noms en vue. Reste à savoir si le public considérera Xania Monet comme une artiste à part entière ou comme l’extension numérique de Nikki Jones.
Source Billboard