Le chanteur et producteur haïtien Jean Robert Pluviose, plus connu sous le nom de scène JBeatz, est un musicien multi-instrumentiste dont les productions cumulent plusieurs millions d’écoutes sur les plateformes de streaming. Invité sur le plateau de « De tout et de rien » le mercredi 17 septembre, il est revenu sur les critiques auxquelles ses œuvres ont longtemps été confrontées dans le milieu musical haïtien, souvent jugées de « seconde zone ».
Avant de se lancer sur le devant de la scène, JBeatz avait déjà publié en 1999 un premier album évangélique. Sous le nom de JP, il s’est imposé comme producteur au cours de la première décennie des années 2000. Il a alors collaboré avec plusieurs figures du Compas, parmi lesquelles Gabel sur « Koute kè m », Kenny Desmangle avec « All I need is you », ainsi qu’Alan Cavé sur « De la Tête aux Pieds ».
« En ce moment, lorsque j’ai produit la chanson De la Tête aux Pieds pour Alan, je me décidais de mettre mon cousin Young Rich là-dessus afin qu’il puisse gagner un peu de popularité sur le marché, j’avais envoyé le morceau à un DJ pour qu’il me donne son avis, au final il l’a joué dans un club avant la publication officielle, la musique a vibré la boîte et je pensais que je ne pourrais jamais travailler avec Alan à nouveau », raconte-t-il.
Ces expériences lui permettent d’acquérir une nouvelle visibilité. Sa musique, parfois considérée comme éloignée du compas traditionnel, trouve cependant son public. Après une dizaine d’années dans cette trajectoire, il décide d’explorer une autre facette de son talent. « J’ai décidé d’entamer ce chemin après avoir vécu une mauvaise expérience dans une discothèque. Par la suite, j’ai réuni plusieurs artistes afin de produire le morceau Fanm Pa m Nan parce que je sais que je ne pouvais pas chanter, le titre a cartonné. Quand je me préparais pour sortir mon album, il y a une personne que j’avais l’habitude de travailler avec lui qui me disait que je ne sais pas chanter et je n’ai pas le profil d’un artiste », se souvient-il.
Malgré les doutes exprimés autour de ses capacités vocales, il poursuit. « Quand j’ai dicté à Flav comment il devait chanter la musique sur laquelle j’ai travaillé avec lui, je la chantais avant lui. Et ça n’était pas mal […] j’ai quasiment le même timbre vocal avec lui, je me suis dit nous aurons deux Flav », explique-t-il.
En 2011, il sort son premier album Our Own World, qu’il produit seul. Il prend également en charge sa distribution. « Après avoir terminé tous les préparatifs pour que mon album soit distribué, j’allais imprimer 5 000 CDs à 1,10 dollar et 5 000 affiches 18/14. Puis j’allais voir les entreprises qui vendaient des CDs dans l’industrie, la compagnie Haitian Movies a pris 25 unités et Compas City a pris 50 pour notre lien amical », poursuit-il.
Constatant la difficulté à écouler son stock, il adopte une autre stratégie. « J’allais voir un autre distributeur qui ne voulait pas prendre, je lui offrais 30 CD pour qu’il donne à toutes les filles qui viennent acheter dans son magasin comme cadeau. J’adoptais cette pratique afin que les gens puissent écouter le disque », dit-il.
Il mise ensuite sur la distribution directe. « C’était le Haitian Compas Festival, j’ai pris ma valise pour aller écouler quelques CDs, comme j’étais avec Evans Jean je croyais qu’on me laissait entrer gratuitement, mais ils m’ont bloqué et laissé passer la star. J’ai dû demander à Evans d’appeler Robert Charlot pour moi qui était à l’intérieur pour qu’il me donne le bracelet qu’il portait », confie-t-il.
Son objectif reste la promotion de l’album. « En arrivant j’ai donné mes CDs à toutes les personnes qui étaient présentes. Ensuite je visitais toutes les discothèques à Miami et les DJs qui contrôlaient la ville, durant le week-end pour donner les restes, raconte-t-il. La semaine suivante j’ai reçu plusieurs appels venant des gens qui voulaient placer leur commande afin d’en avoir pour vendre dans leur business. »
Ses morceaux finissent par circuler largement dans les boîtes de nuit, dont It’s getting late. « Pour ce titre, les DJs étaient en conflit si l’un d’entre eux le joue avant 3h du matin », conclut-il.
Par Youbens Cupidon © Chokarella