Samuel Dameus signe le premier documentaire sur la mobilisation citoyenne du canal de la Rivière Massacre

Lors d’une interview accordée à Carel Pedre et diffusée le vendredi 11 juillet 2025, le réalisateur et photographe haïtien Samuel Dameus a présenté son dernier documentaire intitulé « The Heroes of the Massacre River », consacré à la mobilisation populaire autour de la construction du canal de la Rivière Massacre, à la frontière entre Haïti et la République dominicaine.

Avec ce projet, le fondateur de Boyo Films signe le premier documentaire sur le mouvement « Kanal la pa p kanpe », un élan citoyen né en 2023 à Ouanaminthe. Pour Samuel Dameus, il s’agissait avant tout d’une démarche de préservation de la mémoire collective haïtienne. « Mwen te santi se te yon obligasyon moral pou m dokimante sa », a-t-il expliqué au micro de Carel Pedre, soulignant l’importance de capter et transmettre ce moment par l’image.

Samuel Dameus

L’idée du documentaire est née d’une conversation avec Angie Bell, une amie proche, alors que les discussions autour de la construction du canal prenaient de l’ampleur. Samuel Dameus y voit une opportunité historique. « M te twouve li fè sans pou m ta ka dokimante sa byen, pou n ka asire n ke nan 10, 20 lane aprè, pitit mwen kapab viv youn nan pi gwo mouvman sosyal ki fèt nan jenerasyon m nan. » Conscient de l’impact de cette mobilisation, il affirme avoir voulu en préserver la trace. « Nou pa konn itilize teknoloji a byen. Se pou sa mwen panse li enpòtan pou nou itilize l pou kite de pyès istwa pou pitit nou. »

Le projet a rapidement été confronté à des contraintes logistiques et financières. Le réalisateur n’a toutefois pas attendu de disposer de tous les moyens nécessaires pour débuter. « M pa t ka tann kòb la kont, paske gen bagay, m pat ka rate. » Une campagne de levée de fonds est alors lancée, mais le tournage démarre avant même que la moitié du budget ne soit réunie. Les conditions de production, souvent précaires en Haïti, compliquent davantage l’entreprise. Dameus s’adapte : « Nou bay rezilta avèk fèb mwayen nou te genyen. »

Projeté en grande première le 30 mai 2025 au Little Haiti Cultural Center de Miami, le documentaire retrace les faits avec précision, mêlant séquences-clés, témoignages et images rarement diffusées. Il met en avant certaines figures du mouvement et l’énergie collective qui l’a soutenu. Cependant, selon Samuel Dameus, le film ne restitue qu’une partie de ce qu’il a observé sur place. « Dokimantè a pa menm tradwi 50% reyalite nou te wè sou kanal la. Se te ekstrawòdinè pou n te wè angouman, solidarite pou te rive bati li. »

Carel Pedre

Faute de ressources pour engager un monteur professionnel, le réalisateur décide de se former lui-même. « M aprann edite. M pran Masterclass epi m fè montaj la. » confie-t-il.

Plusieurs projections sont déjà prévues. Le film sera notamment présenté au Alamo Drafthouse Cinema à Washington D.C. le 16 juillet 2025. « Se ap yon gwo reyalizasyon pou mwen », affirme le réalisateur. À partir du 24 juillet, il sera accessible en ligne sur le site boyofilms.com. Samuel Dameus souhaite ainsi rendre ce film visible au plus grand nombre et en faire un support de réflexion collective sur la mobilisation populaire.

Encouragé par cette expérience, il envisage de poursuivre dans cette voie. « M gen lòt pwojè mwen vle fè. Pa gen moun nan kominote a k ap fè dokimantè. M ta vle kontinye nan sans sa. » Le réalisateur entend constituer un ensemble d’œuvres documentaires autour d’Haïti et de sa diaspora. Il revient d’ailleurs sur ses précédents projets, tels que « Faces of Haiti ou Beautiful Haiti », qui avaient amorcé ce regard personnel sur le territoire et les communautés haïtiennes. Par le biais de Boyo Films, il ambitionne de raconter des histoires encore peu explorées.

Carel Pedre et Samuel Dameus

En conclusion de l’entretien, Samuel Dameus s’est également exprimé sur les tensions au sein du milieu artistique haïtien et sur la nécessité d’améliorer la communication entre les acteurs du secteur. « Nan kominote a, fòk nou aprann pale. E di san panse ak onètete. » a-t-il lancé.

Regardez l’interview complète de Carel Pedre avec Samuel Dameus sur la chaîne YouTube de Chokarella ci-dessous : 

Par Ann-Olguetty Loodjenny Dieuve © Chokarella

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