L’auteure, infirmière et spécialiste des relations internationales, Esther Rose Alexandra Verne, publie « History Of Haiti ; A Land Of Hope and Freedom », un livre entièrement en anglais, à l’occasion du mois de l’héritage haïtien célébré à travers le monde. Cette parution s’adresse principalement aux enfants issus de la diaspora haïtienne afin qu’ils puissent découvrir l’histoire d’Haïti.
« Ce projet est donc né d’un besoin ; celui de transmettre notre héritage, notre identité, à la génération suivante », précise-t-elle lors d’un entretien avec notre rédaction. Selon elle, il est important que ces enfants connaissent leurs origines, la portée de leur histoire, et qu’ils puissent s’inspirer du parcours de leurs ancêtres.
Dans cet ouvrage, Esther retrace minutieusement l’histoire d’Haïti selon une approche qu’elle qualifie d’éducative, simple et inspirante. Elle explique vouloir initier les jeunes lecteurs aux fondements de leur identité et aux luttes menées pour la liberté. Le livre, structuré en neuf parties chronologiques, aborde des épisodes comme la période des Taïnos, l’arrivée des Espagnols, la traite des Noirs, les batailles de l’indépendance dont celle de Vertières, et la proclamation de l’indépendance d’Haïti en 1804. « À travers ces neuf parties, j’ai voulu rendre hommage à la force, la résilience et au rôle historique unique du peuple haïtien dans le combat mondial pour la liberté », affirme-t-elle.
L’infirmière confie qu’elle nourrit depuis longtemps un intérêt pour l’histoire de son pays, intérêt qui s’est renforcé après son arrivée aux États-Unis. « J’ai réalisé un vide important : beaucoup de personnes nées et élevées dans la diaspora aiment leur culture, la musique, le drapeau, la cuisine, mais peu connaissent véritablement l’histoire de notre pays », observe-t-elle.
Elle note par ailleurs que nombre de ces personnes peinent à citer ne serait-ce que deux ou trois figures majeures de la guerre de l’indépendance d’Haïti ou à expliquer la place qu’occupe le pays dans l’histoire mondiale. « En constatant cela, j’ai cherché un livre, en anglais, qui raconterait l’histoire d’Haïti aux enfants de la diaspora, un livre aussi riche et formateur que ceux que j’avais lus en Haïti. Mais je n’en ai pas trouvé. C’est là que j’ai compris qu’il fallait le créer », confie-t-elle.

Le livre est désormais disponible sur plusieurs plateformes de vente en ligne à travers l’Amérique et l’Europe, notamment en Allemagne, au Royaume-Uni, en Italie, aux Pays-Bas et aux États-Unis. « Je veux que ce livre sème une graine de fierté, de conscience historique et de confiance en soi dans le cœur de chaque enfant haïtien, où qu’il se trouve dans le monde », indique Esther.
Originaire du Cap-Haïtien, elle raconte qu’elle a pris la décision de laisser une empreinte dans la littérature haïtienne dès l’âge de sept ans. Elle se souvient avoir très tôt compris que l’écriture pouvait jouer un rôle essentiel dans sa vie, lui permettant d’exprimer ses pensées, de continuer à rêver et de raconter des histoires liées à ses racines.
« À l’école des Sœurs de Saint François d’Assise, j’ai reçu un recueil de poésie qui m’a profondément marquée. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à écrire mes propres poèmes, que je récitais chaque dimanche à l’église lors du culte des enfants », se souvient-elle. Elle souligne également le soutien de ses parents, qui l’ont encouragée dans cette voie.
Esther évoque son enfance au Cap-Haïtien et la fierté qu’elle ressentait en présentant ses récits à ses parents. « Ils me demandaient souvent où j’avais trouvé ces histoires et je leur répondais fièrement que c’est moi qui les avais écrites », rapporte l’auteure. Son père, remarque-t-elle, n’a pas tardé à l’encourager à persévérer dans l’écriture. Aujourd’hui, elle explore plusieurs genres : essai, narration, récit historique et texte engagé.
Parmi ses influences, elle cite Odette Roy Fombrun pour son travail sur la transmission du savoir historique, et Chimamanda Ngozi Adichie pour sa capacité à raconter des récits ancrés dans l’identité et la culture. « Mais mon inspiration vient aussi de mon histoire familiale. Mon arrière-grand-père Nicolas Verne, avocat et professeur, avait rédigé des ouvrages pour les étudiants de la faculté de droit du Cap-Haïtien », ajoute-t-elle.
Après son baccalauréat, Esther a quitté Haïti pour poursuivre des études supérieures aux États-Unis. Elle a obtenu un diplôme en sciences infirmières à Broward College puis un autre en relations internationales à Florida International University. Elle envisage de continuer. « Je suis également en voie de finaliser un diplôme en communication sociale », précise-t-elle.
Depuis une dizaine d’années, elle travaille dans le domaine de la santé aux États-Unis. Selon ses propos, cette activité professionnelle l’amène à se déplacer dans plusieurs villes du pays pour pallier le manque de personnel dans les hôpitaux. « C’est une mission humaine avant tout, qui demande beaucoup de résilience et de compassion », explique-t-elle.

Grâce à ce parcours, Esther a décidé d’élargir son engagement en cofondant la Fondation Verne Angrand, une structure dédiée à la promotion de la santé et de l’éducation, notamment en milieu rural en Haïti. « À travers cette fondation, je souhaite mettre en place des actions concrètes, comme des cliniques mobiles pour les enfants et les femmes enceintes, ainsi que des programmes éducatifs qui valorisent la culture, l’histoire et l’identité haïtienne », annonce-t-elle.
Elle reconnaît que l’accès aux sources fiables et la vérification des faits historiques constituent un défi majeur. « Cette histoire est trop riche pour être souvent fragmentée ou mal documentée. J’ai surmonté ces défis grâce à la discipline, la passion, le soutien de mon entourage et surtout, la conviction profonde que cette œuvre était nécessaire », affirme-t-elle. Elle précise avoir dû concilier cet engagement avec ses responsabilités dans la santé et ses activités entrepreneuriales, en apprenant à bien gérer son emploi du temps.
Pour elle, la littérature demeure un outil puissant. « Elle peut guérir, éveiller, dénoncer, transmettre et unir. Pour les auteurs haïtiens, qu’ils vivent en Haïti ou dans la diaspora, elle représente un moyen de renforcer la présence et la fierté de la culture haïtienne », estime-t-elle.
Elle ajoute que ce livre marque le début d’un engagement. « Aujourd’hui, je réfléchis sérieusement à écrire des pièces de théâtre qui mettront en valeur notre culture, nos traditions, nos héros et nos récits historiques. Je crois profondément que le théâtre est un moyen puissant de toucher, d’enseigner et de réveiller la mémoire collective », confie-t-elle.
Depuis l’enfance, elle s’intéresse aussi à d’autres formes d’expression, notamment la danse et le théâtre. « Ces formes d’expression artistique m’ont toujours fascinée », ajoute-t-elle. En parallèle, la fondatrice de Easy Shipping, une compagnie de transport maritime desservant Haïti, entend poursuivre ses études tout en continuant la promotion de son livre.
« En parallèle, je vais entamer une maîtrise à Harvard, ce qui me permettra de renforcer mes compétences et d’élargir mon impact. Mon ambition est de créer des œuvres — qu’elles soient écrites, jouées ou dansées qui célèbrent notre identité et inspirent les Haïtiens, où qu’ils soient dans le monde », annonce-t-elle.
Enfin, elle invite les jeunes souhaitant se lancer dans l’écriture à croire en leur voix. « Écrire, c’est un acte de courage, de mémoire et de transmission. Peu importe où vous vivez, votre histoire, vos origines, vos émotions et vos rêves comptent. Utilisez la langue qui vous parle, mélangez vos influences, parlez de ce que vous connaissez, de ce qui vous touche », conclut Esther Verne.

Par Youbens Cupidon © Chokarella